L’imaginaire politique du postmodernisme américain

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But to be an American (unlike being English or French or whatever) is precisely to imagine a destiny rather than to inherit one; since we have always been, insofar as we are Americans at all, inhabitants of myth rather than history — and have now come to know it.

Leslie Fiedler

Depuis ses premiers mouvements hors de la poétique moderniste, la littérature américaine d'après-guerre a causé bien des discordes chez les critiques. Au fur et à mesure qu'une écriture proprement postmoderne évoluait, de nombreuses interprétations contradictoires en ont été publiées. Les nostalgiques pleurant la disparition des grands modernes ont prononcé la mort du roman dès la fin des années 50. Pour leur répondre sont apparus d’ardents défenseurs de cette nouvelle écriture marquée par l'indécision, caractéristique du climat social de l'époque. Mais le plus important débat sur le postmodernisme littéraire tourne autour de son potentiel politique. Certains de ses détracteurs n’y voyaient qu’un art apathique et trop autoréflexif pour avoir quelque portée sur le monde réel; la littérature postmoderniste, après tout, ne parle que d’elle-même. D’autres, en revanche, s’affichaient comme de grands enthousiastes d'une esthétique qui, par son ironie et sa logique de constante remise en question, affirme une volonté politique de défaire le tissu des idéologies dominantes pour rediriger le regard du lecteur vers les marges, là où les systèmes binaires repoussent ce dont ils n’admettent pas l’existence.

Le postmodernisme littéraire est-il, en dépit de toutes ses contradictions, politique? Son discours, en se tournant vers lui-même, en menant une réflexion sur le littéraire même, boucle-t-il la boucle en se détournant du monde, sans aspirer à aucun impact social? Ou, au contraire, en débusquant l’aspect construit de toute entité narrative, la littérature postmoderniste est-elle plutôt une attaque envers toute structure de pouvoir reposant sur des discours biaisés apparaissant comme neutres? Une entreprise établie dans une logique de déconstruction rencontre nécessairement le problème de l’impossibilité de construction, ou de reconstruction : en effet, une esthétique qui dévoile systématiquement comme fausse toute prise de position univoque peut-elle réellement soutenir une pensée qui se traduise en une action sur le destin social de la nation américaine?

Après l'âpre critique d'Irving Howe, qui exprime très tôt son scepticisme quant à la force politique d’un postmodernisme naissant, deux grands penseurs se porteront à sa défense : Ihab Hassan, qui voit en cette nouvelle esthétique la chance qu’aurait la critique de se renouveler sous forme de paracritique multivoque et de participer de près au devenir humain, et Leslie Fiedler, qui voit un dépassement du système des classes à travers l'abolition des distinctions entre culture lettrée et culture de masse. Ces deux grandes voix offrent deux visions uniques de la portée politique du postmodernisme littéraire qui, si elles ne se rejoignent pas explicitement, se complètent et, surtout, témoignent du climat culturel et politique en pleine ébullition de la fin des années 60 et du début des années 70.

Modernisme / Postmodernisme : Bref aperçu d’une rencontre du troisième type

C'est sur un mode essentiellement négatif que le postmodernisme est originalement défini par la critique. Déjà, durant les années 50, la voix distincte d'une nouvelle littérature prend forme dans le champ littéraire, chez des auteurs tels Kerouac (On The Road, 1957), Burroughs (Naked Lunch, 1959) ou Nabokov (Lolita, 1955). Les premiers critiques du postmodernisme, qui étaient aussi les tout derniers critiques contemporains d'un modernisme affaibli, sont responsables de lui avoir apposé le préfixe « post- », qui lui donne son sens ambigu et occasionne le fait qu'il ne puisse se définir en lui-même et de façon autonome, mais toujours par rapport à son prédécesseur, le modernisme.

Les deux significations possibles de ce préfixe ont défini les deux grands axes de pensée dans la critique du postmodernisme. La première implique une idée de déchéance, comme le suggère Steven Connor dans Postmodernist Culture : An Introduction to Theories of the Contemporary : « to designate oneself as “post” anything, is to admit to a certain exhaustion, diminution or decay. » (Connor, 1997, p.74.) Le postmodernisme, en ce sens, serait associé à une certaine déchéance du modernisme, un dépérissement de ses grands idéaux et un sursis parasitaire de ses réalisations culturelles. L'autre acception du terme, plus affirmative, permet de considérer le postmodernisme comme une naissance positive suite à la tombée du géant qu'était le modernisme. En ce second sens, le préfixe « post- » ne signifierait pas l'épuisement d'une esthétique, mais bien la libération de la littérature d'un imaginaire dépassé.

Dès la fin des années 50, la critique commence à recenser les premiers balbutiements d'une esthétique postmoderniste dans des articles de Irving Howe, Harry Levin et, plus tard, Gerald Graff et Daniel Bell. En 1959, Howe, à la fois militant socialiste de longue date et critique littéraire, publie « Mass Society and Postmodern Fiction » dans Partisan Review, journal de la gauche américaine portant sur les arts et la littérature. Considéré comme un des articles fondateurs du long débat qui oppose les enthousiastes et les détracteurs du postmodernisme, ce texte inaugure la conversation sur une note peu flatteuse. Les textes littéraires auxquels s'attarde son analyse ne sont aujourd'hui jugés représentatifs que des premiers jours du postmodernisme américain; toutefois, l'analyse de Howe lance une tradition d'analyse gauchiste et engagée du postmodernisme et le situe dans le contexte social qui a vu et, en quelque sorte, provoqué sa naissance : la société de consommation des belles années du capitalisme américain.

Pour Howe, la littérature postmoderniste est indissociable du contexte postmoderne. Elle est son juste symptôme, son effet cohérent. La société de l'après-guerre ne souffre plus de graves besoins matériels comme dans les années 30; pourtant, les individus se sentent de plus en plus piégés et impuissants. Les signes distinctifs qui séparent les classes sociales se sont atténués; cependant, les différences de conditions de vie propres au système des classes demeurent, malgré le fait qu'elles soient plus fuyantes et insaisissables. Les grandes structures d'autorité perdent de leur pouvoir, laissant les populations sous le joug d'une trop grande liberté. C'est ce monde que reflète, selon Howe, la nouvelle littérature américaine; si elle ne se préoccupait pas de la réalité américaine contemporaine, elle ne pourrait réclamer ce titre. Mais ce contexte engendre une écriture à laquelle manquent justement ce que Howe nomme « the focused desire, the quick apprehension and notation of contemporary life » (Howe, 1992, p.29). Une existence détachée d'elle-même ne peut inspirer qu'une écriture détachée de l'existence, c'est-à-dire, pour Howe, une écriture vide.

Afin d'illustrer son propos, Howe s'attarde aux écrivains de la « beat generation », les jeunes auteurs issus de San Francisco et qui seront parmi les premiers à se détacher de l'esthétique moderne. Il les compare à Kingsley Amis, John Braine et John Wain, un groupe d'écrivains anglais des années 50 connu sous le nom des angry young men. Ces derniers ont une réalité sociale à dénoncer et à partir de laquelle ils développent leurs fictions, ce que Howe considère être l'outil le plus précieux d'un romancier. Ces auteurs sont en quelque sorte bénis,

blessed with something utterly precious to a writer : a subject urgently, relentlessly imposing itself upon their imagination. [...] Their work touches upon sore spots in English life, hurting some people and delighting others. It threatens the Establishment, perhaps its survival, more likely its present leaders. It creates tension, opposition, a dialectic of interests. All of which is to say : it rests upon an articulated, coherent though limited vision of English social relations. (Ibid., p.30.)

Selon Howe, les postmodernistes n'ont pas de telle cause, pas de réalité sociale avec laquelle régler leurs comptes. Pour cette raison, leur littérature souffre d'une vacuité absolue. Pour être politique, croit-il, la littérature doit se doter d’une cause.

La thèse de Howe est que, quoiqu'une littérature nationale se doive de s'occuper de la réalité sociale qui lui est contemporaine, une littérature qui se veut le reflet de la société postmoderne américaine est nécessairement amorphe et dépourvue de profondeur historique. L’impression de Howe vient de ce que la pensée postmoderne, par définition vague et informe, ne peut servir de support à l'argumentaire d'un discours unique et clairement orienté. L'apport des théoriciens français démontrera d'ailleurs, plusieurs années plus tard, que les changements sociaux qui ont eu lieu après la Seconde Guerre mondiale ont appelé de nouveaux modes de pensée se trouvant à l'opposé des prises de positions univoques caractéristiques des philosophies occidentales depuis les Lumières. Quoique Howe n'utilise pas les termes suivants, on retient de sa critique que l'esthétique postmoderniste est en quelque sorte victime d'une réalité historique qu'elle se doit de mettre en récit à travers la force totalisante du langage, alors que cette réalité est elle-même multiple et informe et se refuse à la totalisation : « How to give shape to a world increasingly shapeless and an experience increasingly fluid […]? » (Ibid., p.25.) Les romanciers de l'après-guerre, posant le regard sur la réalité qui les entoure, constatent « the hovering sickness of soul, the despairing contentment, the prosperous malaise. […] Yet the problem remain[s] : how can one represent malaise, which by nature is vague and without shape? » (Ibid., p.27.)

Le problème que pressent Howe est celui d'une crise de la représentation, car le problème de la littérature postmoderne est non le malaise social lui-même, comme Howe semble le suggérer en comparant le postmodernisme américain à la littérature des « angry young men », mais sa représentation, son passage à l'écrit. Cette question est au centre du débat sur la puissance politique de l'esthétique postmoderniste. Jürgen Habermas, seize ans après Howe, confirmera dans Legitimation Crisis l'intuition de ce dernier en supposant une influence circulaire entre la dégradation des idéaux progressistes et la détérioration des grands schémas de représentation occidentaux. Habermas, comme Howe, voit entre ces deux termes une dynamique cyclique à laquelle la littérature postmoderniste ne peut rien changer; elle n'a d'autre choix que d'y participer. Pour d'autres critiques comme Fredric Jameson et Jean-François Lyotard, une crise de la représentation comme celle de l'après-guerre a plutôt des conséquences épistémologiques importantes. Pour ceux-ci, la représentation du savoir, entre autres à travers l'art, est la condition même de ce savoir. Une remise en question de la représentation mène donc à une remise en question de la connaissance elle-même, et des idées considérées comme des vérités. De ce point de vue, la littérature postmoderne, en remettant en cause les schémas traditionnels de la représentation, exercerait une action directe sur les catégories de savoir.

Il demeure que, pour Howe, disciple du socialisme dont même le maccarthisme n'a pu saper l'engagement, le postmodernisme est trop flasque pour mériter ses lettres de noblesse. Des années avant que les post-humanistes européens en popularisent l'idée, il semble que Howe pressente que la pensée postmoderne s'oppose à la logique de l'héritage des Lumières, dont est issu en définitive le marxisme : la pensée des Lumières suppose effectivement un humanisme et une idéologie du progrès auxquels se refuse le postmodernisme, en raison de son rejet de toute doctrine univoque. C'est ce nouveau climat culturel qui, selon Howe, inspire la nouvelle génération d'auteurs, climat qu'il désigne très vaguement sous le nom de « culture de masse » et qui se caractérise par une suite de symptômes dont plusieurs peuvent être interprétés comme une réticence à exercer une action politique sur le monde :

Passivity becomes a widespread social attitude : the feeling that life is a drift over which one has little control and that even when men do have shared autonomous opinions they cannot act them out in common. […] Disagreement, controversy, polemic are felt to be in bad taste; issues are ʻironed outʼ or ʻsmoothed awayʼ; reflection upon the nature of society is replaced by observation of its mechanics. (Ibid., p.25.)

Enfin, la combinaison de la passivité de l'individu et de l'aversion sociale pour la discorde culmine en un passage graduel à l'obsolescence de l'engagement au profit de causes, quelles qu'elles soient : « The era of ʻcauses,ʼ good or bad, comes to an end; strong beliefs seem anachronistic […]. » (Id.)

L'esthétique postmoderniste serait, pour Irving Howe, la conséquence d'une dépolitisation croissante de la société américaine, non subversive ou critique, mais simplement complice et même platement symptomatique de l'apathie sociale. C’est en réaction à cette première interprétation politique mais négative du postmodernisme que se construiront quelques années plus tard les discours de penseurs comme Leslie Fiedler et Ihab Hassan. Ce dernier, connu principalement pour la table d'oppositions entre le modernisme et le postmodernisme qu'il a publiée en 1982, publie toutefois ses premières réflexions sur le sujet bien des années plus tôt, vers la fin des années 60.

Nouveaux territoires de la critique

La pensée de Hassan a beaucoup changé à travers les années. Elle s'est transformée et raffinée, au point où il a subséquemment ressenti l'impératif de revenir sur ses propres positions pour les modérer. Il importe tout de même de se référer aux articles qu'il a publiés sur le sujet dès le début des années 70, au moment où il expérimente avec ce qu'il nomme une « paracritique », afin de rendre justice au ton de son intuition première, ainsi qu’à la période qui a suivi les écrits incendiaires de Howe et de Levin sur la montée du postmodernisme.

Les premiers articles de Hassan au sujet du postmodernisme n'utilisent pas cette lourde expression qui est à ce moment encore rare dans le domaine littéraire et à laquelle il préfère les termes « anti-literature » ou « the literature of silence », dont il retrace des manifestations dans le paysage littéraire bien au-delà de la période désignée aujourd'hui comme postmoderne. De la distinction entre le postmodernisme et le modernisme chez Hassan, Connor offre l'explication suivante :

So one of the most obvious problems for anyone trying to extract from Hassan's work a definition of what postmodernism might be, is his unsurrendering insistence that « the postmodern spirit lies coiled within the great corpus of modernism » (TPL, 139). This is to see postmodernism partly as a kind of Dionysiac virus within modernism, tempting it to the extremes of madness and self-dissolution, and partly as the secret inner principle of modernism. (Connor, 1997, p.118.)

Plutôt que de considérer le postmodernisme comme étant en conflit ou en opposition directe avec le modernisme, il voit entre les deux mouvements une fluide continuité. Hassan cherche à dépeindre l’évolution de la place prise par ce qu’il nomme le « silence » dans la littérature américaine et en trouve les traces dans des textes datant de bien avant la Seconde Guerre mondiale.

En 1970, Hassan publie dans le Virginia Quarterly un article intitulé « Frontiers of Criticism : Metaphors of Silence » qui se veut une réponse aux détracteurs de la nouvelle littérature dont la voix se fait de plus en plus entendre au cours des années 60. À propos des positions prises dans cet article, Hassan se montrera par la suite plus pondéré :

In 1959 and 1960, Irving Howe and Harry Levin wrote of postmodernism rather disconsolately as a falling off from the great modernist movement. It remained for Leslie Fiedler and myself, among others, to employ the term during the sixties with premature approbation, and even with a touch of bravado. Fiedler had it in mind to challenge the elitism of the high-modernist tradition in the name of popular culture. I wanted to explore the impulse of self-unmaking which is part of the literary tradition of silence. (1987, p.86.)

Une tradition de silence que, dans son article de 1970, Hassan dit vouloir étendre également à la pratique de la critique littéraire. En effet, à ce moment de l'histoire, nombreux sont ceux qui considèrent que la critique se construit de façon tout à fait anachronique, dont Ralph Cohen, fondateur du périodique New Literary History : « The writings of the critics and theorists who argue for “postmodern” as a turning away from modernism find themselves, with few exceptions, continuing to write in the essay genres that were characteristic of modernism. » (Cohen, 2000, p.304.) Hassan partage entièrement ce point de vue : l’analyse littéraire de l’époque, qui fonctionne toujours sous le mode moderniste, ne rend pas justice à l'esthétique postmoderniste.

Dans son essai de 1970, Hassan tente donc de renouveler sa propre pratique en incorporant dans son discours critique certains traits formels attribués à la fiction postmoderniste : au lieu de structurer son argumentaire en suivant une suite logique et univoque, il le construit à l'aide de listes, d'anecdotes, d'un récit onirique et même d'une récitation prenant la forme d'un poème. Le langage de l'autorité moderne se défait pour laisser place à une réflexion fluide aux conclusions nuancées et ouvertes. Ses explorations formelles atteignent un nouveau sommet dans son article de l'année suivante, « POSTmodernISM : A Paracritical Bibliography », qui inclut des explorations typographiques, une bibliographie au beau milieu du texte ainsi que des blancs à remplir par le lecteur. Par ailleurs, le propos lui-même repose sur une logique de la disjonction et de la plurivocité, si bien que la pensée qu'il exprime ne peut en définitive être séparée de la matérialité même du texte.

Face à la naissance d'une critique nouvelle, qui est à la critique moderne ce que le postmodernisme est au modernisme, on peut se demander quelle est réellement la limite entre la littérature et la critique. C'est d'ailleurs l'abolition de cette limite que propose Hassan. Suivant la logique selon laquelle « fact and fiction have now become the same » (Hassan, 1970, p.89), les textes critiques se doivent, pour leur part, de se fondre à la littérature en assimilant ses caractéristiques formelles :

Criticism should learn about discontinuity […]. It should offer the reader empty spaces, silences, in which he can meet in the presence of literature. This is the new anti-criticism; or better still, paracriticism. This, as Brown saw, is also the method of symbolism [...]. (Ibid., p.91.)

Hassan propose à la critique de devenir, comme la littérature qui est son objet, multivoque. Ce sont les propos de Norman O. Brown, philosophe et penseur de l’herméneutique moderne, qu’il reprend afin de soutenir cette proposition. Brown prétend que la logique moderne de la lecture et de l'interprétation des textes se dessine sur l’horizon du protestantisme, qui transmet un modèle précis de lecture à travers son interprétation du texte biblique. En établissant de façon claire l'unique réelle signification des textes sacrés, l’herméneutique protestante a, selon Brown, transmis à la critique moderne une tradition d'engagement tacite au principe d'univocité qui projette sur tout texte analysé l'impression d'une unité organique. Hassan rejette cette tradition. Principale source, selon lui, du mécontentement des critiques face au postmodernisme, qui se refuse à une lecture limpide et irrécusable, elle les empêcherait de voir tout le potentiel rassembleur de la littérature du silence dont on sent, à travers les envolées de Hassan dans « Frontiers of Criticism : Metaphors of Silence », qu'il y voit la clé du destin humain.

Hassan affirme donc qu'une réforme de l'esthétique de la critique est nécessaire, mais dans quel but? Il rappelle la thèse postmoderne selon laquelle l'humanisme des trois derniers millénaires tire à sa fin et que, si la littérature plus qu'aucun autre art a soutenu cette idéologie à travers l'histoire, c’est là un rôle que la critique lui a toujours envié. Devant ce constat, une question se pose : « How will criticism speak when humanism ceases to breathe? How will criticism survive? » (Ibid., p.84.) Afin de retrouver une fonction sociale, la critique devra, tout comme la fiction, se réformer. Plus la société avance vers son achèvement le plus parfait, moins l'art lui est nécessaire : « The excellence of our senses, the redemption of our consciousness, the perfection of the human community, tend to make art superfluous. » (Ibid., p.86.) La littérature du silence a pour Hassan une force négative qui lui confère une propension à la destruction ou encore au remplacement par le néant, force négative qui culmine en un déni de l'art lui-même. Cette littérature, afin de réaliser sa propre négation, se montre sous son jour le plus absurde et nie sa propre existence à travers l'usage de la page blanche. Chez des auteurs comme Robert Coover, Donald Barthelme ou John Barth, elle dérive vers le ludisme, l'aléatoire, l'impossibilité interprétative.

L'effet de cette inanité grandissante de l'art en tant qu’art est que l'autonomie de la littérature par rapport à la réalité est de moins en moins prisée. D’ailleurs, comme le remarque Hassan, « the distinction between art and life is one that few contemporary artists find interesting to maintain. » (Ibid., p.88.) Paradoxalement, c'est ce rapprochement de la littérature et de la réalité, causé par le glissement de l'art dans la désuétude, qui lui donne un certain pouvoir politique. L’art n’est désormais plus une sphère de la vie humaine à l’écart des autres; afin de justifier son existence, elle doit se mêler au destin humain. Et comme les distinctions entre critique et littérature tendent également à s’amenuiser, la même chose peut être dite de la critique littéraire : « the critic must seek continually to wed language and reality in some region of his awareness […] [and] learn that nothing finally needs to be said about literature. Beyond criticism, and teleologically present in criticism, lie the silent erotics of participation, of union. » (Ibid., p.90.) Par la rencontre du texte et du monde, la critique doit réflexivement proclamer sa propre inefficacité. Elle porte en son propre sein à la fois la trace de son inutilité et le mouvement qui l'unit à la vie et lui donne son pouvoir participatif dans le devenir humain.

Hassan est réputé pour être parmi les premiers critiques américains à avoir pris connaissance des travaux des déconstructionnistes (Bertens. 1995. p.45) et sa pensée en porte d’ailleurs les couleurs : « In a very general way, most of Hassan's postmodern features — and perhaps all of them — are related to Deconstructionism's concept of a decentered world. » (Bertens, 1986, p.28.) C’est d’ailleurs par cette disparition des forces centralisatrices que Hassan caractérise les tendances politiques du postmodernisme, comparativement à celles du modernisme : « Yet it is already possible to note that whereas Modernism created its own forms of Authority, precisely because the center no longer held, Postmodernism has tended toward Anarchy, in deeper complicity with things falling apart. » (Hassan, 1971, p.29.) La thématique de l'anarchisme inhérent à l'esthétique postmoderniste revient d'ailleurs à plusieurs reprises dans les textes de Hassan. Il s’agit d’une esthétique d’attaque : « [n]ot only aesthetic but also actual (guerilla) attacks on reason and history, science and society. » (Ibid., p.27.)

La position du postmodernisme sur le compas politique est une préoccupation constante de la pensée de Hassan, mais les textes présentés ici datent du début de sa réflexion sur le sujet, réflexion qu'il a développée jusque dans les années 2000. De plus, comme l’esthétique de ses premiers articles leur refuse une conclusion univoque, ils adoptent une position mitigée et empreinte de doute par rapport à la force politique du postmodernisme, en comparaison avec celle du modernisme :

Yet is the Anarchy of Postmodernism a deeper response, somehow more inward with our destiny? Though my sympathies are in the present, I can not believe this to be so. True, there is enhancement of life in certain anarchies of the spirit, in humor and play, in love released and freedom of the imagination to overreach itself, in a cosmic consciousness of variousness as of unity. I recognize these as values intended by Postmodern art, and see the latter as closer, not only in time but even more in tenor, to the transformation of hope itself. (Ibid., p.30.)

Cette incertitude n'empêche pas qu'un idéal transparaisse à travers les écrits de Hassan, qui demeure tout compte fait plus humaniste qu'il ne veuille bien le laisser croire, « because he still expects so much from literary language. » (Bertens, 1995, p.45.) C'est l'idéal d'une élévation spirituelle de la communauté humaine à travers la puissance de l'esthétique postmoderniste qui le hante quand il conclut ainsi sa réflexion sur les nouveaux rôles que la critique telle qu'il l'envisage (multivoque, disjonctive, paracritique) doit acquérir :

[t]here is a power in literature that enhances our presence as it recovers the infinitude of human consciousness. That same power, richly felt, adapts the future to our needs. That same power fits our will to evolution. Let criticism, then, [...] become a design for life. Let it envision a new man. Let it also praise, and thus foster mutability. This I know : at the frontiers, things come together. The frontiers are here. As Cage put it, « The purpose of one activity is no longer separate from the purpose of any other activity. » Perhaps all activities are a metamorphosis that we can understand only, silently, in metaphors of love. (Hassan, 1970, p.95.)

C'est là un bilan aux accents plutôt mystiques dont l'avantage est d'échapper à la conclusion monolithique qui est le propre de la critique moderne. La question politique demeure plutôt éthérée dans le discours que propose Hassan sur la question du postmodernisme; cependant, son projet de renouvellement de la critique est incontestablement lié à l'exercice d'une action positive sur le destin humain, dans un contexte où les champs artistique, social et culturel ne sont plus des systèmes isolés les uns des autres, mais des vases communicants qui à la fois s'inspirent de ce destin et le nourrissent. La conception que se fait Hassan de l'impact politique de la littérature américaine de l'après-guerre, pour tout ce qu’elle communique en termes d’optimisme et de conviction, n'est toutefois pas aussi concrète ou puissante que celle de son contemporain et frère d'armes dans la bataille de la légitimation du postmodernisme, Leslie Fiedler.

Fiedler et le Pop art : franchir le gouffre

Les années 60 sont la décennie du Pop art. Leslie Fiedler fonde sa conception du postmodernisme littéraire presque exclusivement à partir de l'influence que ce grand courant artistique exerce sur la littérature. Résolument américain dans sa pensée et les objets de sa critique, Fiedler a parfois même été qualifié d’europhobe. Dès 1965, dans le périodique Partisan Review et en réponse à Irving Howe qui, six ans auparavant, y avait publié sa critique virulente du postmodernisme, il fait paraître son article « The New Mutants » dans lequel il explique comment le Pop art a réussi à franchir et à éliminer le gouffre entre la culture de masse et la culture d'élite. Quelques années plus tard, il précise ses observations dans Cross the Border – Close the Gap, un essai qui proclame la mort du modernisme et l'avènement de l'ère postmoderniste, en faveur de laquelle il se prononce, du fait qu'elle représente pour lui un mouvement très attendu de démocratisation de l'art.

Fiedler fait partie des ennemis du modernisme les plus bruyants, annonçant sans réserve que « the traditional novel is dead — not dying, but dead. » (Fiedler, 1992, p.34.) Les années 60 sont les moments de gloire d'un Pop art fort et vigoureux qui fournit une forte inspiration aux renouvellements formels de la littérature postmoderniste. Cette littérature se caractérise par une esthétique dominée par les procédés que sont le collage, la parodie et le pastiche, et à partir de laquelle Fiedler définit sa version du postmodernisme. Cela se manifeste, selon Fiedler, par la récupération des formes du western, de la science-fiction et de la pornographie; il n'est d'ailleurs pas anodin que Cross the Border – Close the Gap ait été d'abord publié en 1969, sous forme d'article dans le Playboy Magazine de Hugh Hefner. Sa critique, parce qu'elle vise moins la démocratisation de l'art des hautes sphères culturelles que la légitimation de la culture populaire, s'inscrit dans une tradition critique américaine; elle se distingue d'ailleurs volontairement de la tradition des penseurs européens. Le postmodernisme, pour Fiedler, est incontestablement américain, comme l'annonce l'exemple du western en tant que forme populaire de premier choix à être récupérée. D'ailleurs, celui-ci n'hésite pas à disqualifier du postmoderne le nouveau roman français : « Robbe-Grillet, for example, is still the prisoner of dying notions of the avant-garde; and though he is aware of half of what the new novelist must do (destroy the Old, destroy Marcel Proust), he is unaware of what he must create in its place. » (Ibid., p.36.) Selon lui, il manque à la tradition européenne cet appel à la culture populaire que le roman se doit de faire pour survivre et se mériter le qualificatif vivant et actuel de postmoderniste.

La grande valeur du postmodernisme en tant que récupération des formes populaires est qu'il remet en question l'intégrité des genres littéraires. Parallèlement à Ihab Hassan, Fiedler suggère une révolution du genre de la critique : « Why not, then, invent a New New Criticism, a Post-Modernist criticism appropriate to Post-Modernist fiction and verse? » (Ibid., p.32.) Cette critique réinventée serait contextuelle plutôt que textuelle, délaissant la structure et la syntaxe au profit d'une dynamique et d'un rythme divinatoires, magiques et empreints de folie. Comme Hassan, il remet en question la distinction catégorique effectuée entre critique et littérature. Cette tendance postmoderniste à la transgression des registres et des genres réservés aux cultures « haute » ou « basse » est porteuse d'une pulsion anti-artistique et anti-élitiste qui, par ailleurs, se trouve à être anti-moderniste et anti-intellectuelle.

La prémisse théorique que donne Fiedler à son « The New Mutants » ne laisse planer aucun doute sur la conception qu’il a du rôle social de la littérature :

At any rate, [affirme-t-il,] we have long been aware (in the last decades uncomfortably aware) that a chief function of literature is to express and in part to create not only theories of times but also attitudes toward time. Such attitudes constitute, however, a politics as well as an esthetics […]. (Fiedler, 1965, p.506.)

Andreas Huyssen fait remarquer que la scandaison du préfixe « post- » dans cette communication (car l’essai de Fiedler est la retranscription d'une conférence prononcée sur le campus de Rutgers en juin 1965) a eu un effet exaltant : « [t]he postmodern harbored the promise of a “post-white”, “post-male”, “post-humanist”, “post-Puritan” world. » (Huyssen, 1988, p.194.) Le roman se voit attribuer « a revolutionary or prophetic or futurist function » (Fiedler, 1965, p.506) qui devient, de plus en plus clairement dans les propos de Fiedler, une puissance active sur l'avenir social des États-Unis.

Fiedler écrit à un moment de l'histoire où la contre-culture américaine s'exprime haut et fort. Les années 60 sont une période explosive de protestations populaires et de contestation de l'autorité en place; il n'est donc pas surprenant que la littérature prenne une importance politique si marquée dans la pensée de Fiedler. Les brouillages entre culture d'élite et culture de masse prennent d'emblée une couleur subversive :

[T]o turn high art into vaudeville and burlesque at the same moment that Mass Art is being irreverently introduced into museums and libraries is to perform an act which has political as well as aesthetic implications : an act which closes a class, as well as a generation gap. The notion of one art for the « cultural, » i.e., the favored few in any given society and in another subart for the « uncultured, » i.e., an excluded majority […], in fact represents the last survival in mass industrial societies (capitalist, socialist, communist — it makes no difference in this regard) of an incidious distinction proper only to a class-structured community. (Fiedler, 1992, p.43.)

Face à l’existence de différents types de culture correspondant à différentes classes sociales, face aux perturbations dont le Pop art est responsable dans ce contexte social, force est de constater que, comme l'affirme Fiedler, « Pop Art is, whatever its overt politics, subversive : a threat to all hierarchies insofar as it is hostile to order and ordering in its own realm. » (Id.) En questionnant les distinctions entre les différentes « classes » d’art, le postmodernisme questionne par extension le système social des classes.

Si le modèle de potentialité politique de Fiedler possède de grandes forces, il comporte néanmoins une faille que dénonce Paul Maltby dans son essai, Dissident Postmodernists. Fiedler assume que la littérature postmoderniste réussit à réunir deux lectorats : le cultivé et le populaire. Toutefois, comme le fait remarquer Maltby,

[s]urely one has to be intellectually prepared for works like Lost in the Funhouse [John Barth] or Pale Fire [Vladimir Nabokov] […]. These are « self-reflexive » works which depend upon the reader's prior knowledge of the narrative conventions they exploit, parody, and subvert. Whether or not these works sell well, they speak, first and foremost, to the minority sensibility of the college educated. (1999, p.18.)

Les textes que Fiedler prend en exemple pour définir son esthétique, même s'ils se font connaître d'un large public, ne s'adressent en définitive qu'aux récipiendaire d'une culture lettrée, c'est-à-dire à une élite; en cela, le postmodernisme de Fiedler se rapproche du modernisme qu'il dénonce précisément là où il prétend s'en distancier.

Il n'en demeure pas moins que le modèle proposé dans « The New Mutants » et Cross the Border – Close the Gap a le mérite d'anticiper de plusieurs décennies sur les développements subséquents dans les discours sur le postmodernisme :

Although Fiedler does not yet present the typical 1980s view of Enlightenment humanism as deeply prejudiced against women and people of color, he anticipates the Enlightenment critique that would be imported with the work of the French theorists. He is, with qualificartions such as « post-white » and « post-male », arguably even closer to the spirit of the later 1980s and early 1990s than the French theorists who are now generally seen as the champions of posthumanisms. (Bertens, 1995, p.30.)

En effet, la pensée de Fiedler en appelle à l'avènement d'un débat plus poussé sur la dialectique postmoderne. Cette dialectique, ancrée dans la tension qui caractérise toujours les prises de position critiques sur le postmodernisme après Fiedler, oscille entre complicité avec le système établi d’une part et, d’autre part, contestation des structures de pouvoir au nom de la démocratisation de l'art.

De la fin des années 50 jusqu’à aujourd’hui, le postmodernisme a résisté à tout consensus, dans la pratique comme dans la critique. Ses formes multiples ont contribué à élargir l’éventail des discours à son propos; mais c’est d’abord l’ambigüité de son discours qui a suscité la discorde. Comment, après tout, déconstruire le concept d’idéologie et ensuite prétendre détenir une solution ou un discours alternatif? À la fois complice et contestataire, le postmodernisme littéraire ne propose rien sinon d’exposer le fait qu’il n’y a rien à proposer. Mais, déjà, cette proposition peut être le point de départ d’une action sociale qui se situerait en dehors de la littérature; c’est ce que pressent Hassan quand il glorifie une littérature qui tend à s’annihiler elle-même, pour laisser place à l’accomplissement du destin humain. Fiedler non plus n’est pas si loin de cette idée de destruction de l’art. En subvertissant les règles qui déterminent quel type d’art convient à quelle classe sociale, le postmodernisme de Fiedler porte atteinte à la structure même du monde artistique et littéraire. Il en résulte que sa pulsion dominante est destructive par rapport à l’art, vu comme un adjuvant à l’inégalité sociale. Cette pratique artistique s’auto-consume dans l’espoir de voir se construire, dans le sillon laissé par sa destruction, une réelle pratique politique de démocratisation.

Tout comme la fiction littéraire se nourrit de fiction à travers le phénomène de l'intertextualité, la critique littéraire se nourrit également de critique. Les discours sur la littérature se répondent, s'entre-citent et s'inspirent les uns les autres comme autant de nouvelles ou de romans. Avec la paracritique d'Ihab Hassan, un pas de plus est franchi : la critique, véhicule traditionnel d'un contenu réflexif, s'approprie une forme nouvelle, la forme de la fiction qu'elle commente. L'innovation formelle est réputée être le propre de la création littéraire. La critique a-t-elle toujours été une forme littéraire? Fiedler nous le confirme : « criticism is literature or it is nothing. » (1992, p.33.) Le postmodernisme a aboli l'intégrité générique non seulement à l'intérieur du domaine de la fiction, mais à travers tout le domaine du textuel. Même la fiction, chez John Barth, s'occupe de discours critique. Le postmodernisme a sévi; les frontières entre les genres ne seront plus jamais imperméables. Mais il y a plus : les frontières entre la réalité et la fiction se désagrègent. Qu’il soit critique ou littéraire, le texte postmoderniste s’occupe définitivement de lui-même, c’est-à-dire de politique.

 

Bibliographie

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Pour citer cet article: 

Ladouceur, Moana. 2010. « L’imaginaire politique du postmodernisme américain », Postures, Dossier « Post - », n°12. En ligne < http://revuepostures.com/fr/articles/ladouceur-12 > (Consulté le xx / xx / xxxx). D'abord paru dans: Ladouceur, Moana. 2010. « L’imaginaire politique du postmodernisme américain », Postures, Dossier « Post - », n°12 p. 49-64